Un patrimoine vivant et populaire à redynamiser

El Mensej veut revaloriser le savoir-faire populaire, en permettant aux artisanes d’avoir une juste place dans la chaîne de valeur. La préservation de la tradition ne peut se faire qu’à travers une autre approche économique, où les artisanes ont un meilleur accès au marché, une clientèle mieux sensibilisée et une perception valorisée au sein de la communauté. Les premières artisanes qui ont intégré la dynamique sont des mères de familles qui maitrisaient le savoir-faire du tissage, mais qui n’en vivaient pas faute de commandes et d’accès direct au marché. Les femmes « sortaient » leur métier à tisser (mensej) essentiellement à l’occasion des mariages pour le trousseau de la mariée. Elles étaient alors payées, souvent en nature (sucre, café, thé) pour réaliser des tapis. Ce sont souvent les plus pauvres qui se mettaient à tisser pour avoir un peu d’argent. Connaissant l’engouement qui existe aujourd’hui pour les produits de l’artisanat, en Tunisie comme à l’international, El Mensej propose un dispositif permettant à ces femmes de s’orienter vers l’autonomie économique à travers les ressources disponibles à proximité.

El Mensej se base sur les ressources disponibles dans l’entourage immédiat des artisanes: les métiers à tisser, installés dans le domicile, ne consomment ni eau ni énergie. Quant à l’expédition des produits, El Mensej recourt à des systèmes de transport déjà existants (cars, taxis collectifs qui font le trajet Nefta – Tunis). Mais surtout, la matière première est issue du détricotage des fripes. Cette habitude pleine de bon sens de ces artisanes consiste à détricoter des pièces en laines achetées sur le marché hebdomadaire à très bas prix. Les pelotes reconfectionnées permettent ainsi de tisser à un moindre coût. De plus, le rendu est de très bonne qualité et l’entretien des pièces est beaucoup plus facile qu’avec de la laine « classique ». En faisant du recyclage et du savoir-faire populaire la base de leur source de revenus, El Mensej met en évidence qu’il est possible d’améliorer sa situation personnelle à partir des ressources locales et peu onéreuses.